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Les livres nous relient.
Ce site a pour objet d'établir des liens multiples et entrecroisés entre les livres, ceux qui les lisent et ceux qui les écrivent. GB
CHRONIQUES LITTERAIRES - Ouvrages des auteurs de A à E
![Capture d’écran 2017-10-23 à 12.10.53.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_57c03b47983e43f4b67ad8053d8d3b5d~mv2.png/v1/fill/w_136,h_195,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-10-23%20%C3%A0%2012_10_53_pn.png)
NOS RICHESSES de Kaouther ADIMI, roman.
« Nos richesses » est le troisième roman de cette jeune femme née à Alger en 1986. Dire ici que l’écrivain est jeune c’est augurer que cette auteure a de belles perspectives d’avenir littéraire devant elle. Après avoir lu ce livre c’est ce que nous lui souhaitons.
Ce récit se déroule entre 1930 et 2017. Période pour le moins trouble en France et dans le monde (mais quelle période ne l’est pas ?) Voici un rappel des conflits (hélas non exhaustif.) Guerre mondiale de 1939 à 1945, guerre d’Indochine de 1946 à 1954, guerre d’Algérie de 1954 à 1962, guerre du Vietnam de 1955 à 1975, guerre civile algérienne de 1991 à 2002 et bien sûr la guerre politico-religieuse actuelle une guerre mondiale qui ne dit pas son nom. Le livre présente un grand intérêt littéraire, historique et humain. On peut le lire en privilégiant l’un ou l’autre de ces trois prismes mais on voit vite que les trois sont liés. C’est sa simplicité qui fait sa force. Il montre comment, au milieu de pires difficultés internes et externes, un libraire-éditeur, Edmond Charlot, d’abord seul, puis avec des amis dont il su s’entourer, promeut des livres et des auteurs tels que Roblès, Camus, Max-Pol Fouchet, Gide, Saint-Exupéry, Vercors, Bosco, Soupault et d’autres encore. « Moi, j’aime publier, collectionner, faire découvrir, créer du lien par les arts » dit-il. On le suit au cours de son parcours à la fois professionnel et passionnel mais, au fil des pages, on se rend compte que le personnage prédominant pour ne pas dire principal du livre c’est bel et bien la librairie. L’ouvrage a la forme d’une sorte de journal de bord à travers lequel on voit l’évolution de la librairie, de la maison d’édition qui lui est liée et de tous les protagonistes qui à un moment ou un autre sont en relation avec l’une et l’autre. Le nom de la librairie « Les vraies richesses » reflète une réalité que défend Edmond Charlot : chaque livre est une richesse ! « Vous serez face à une inscription sur une vitrine : un homme qui lit en vaut deux. Face à l’Histoire la grande, celle qui a bouleversé ce monde mais aussi la petite, celle d’un homme Edmond Charlot, qui en 1936 âgé de vingt et un ans ouvrit la librairie de prêt Les vraies richesses ».
« De cette aventure, dont nous ne savions pas que nous la vivions, il reste pour moi une sorte de mirage. Charlot fut un peu notre créateur à tous, tout au moins notre médecin accoucheur. Il nous a inventés [… ] engendrés, façonnés, cajolés, réprimandés parfois, encouragés toujours [… ] », écrit Jules Roy dans ses mémoires.
Merci à Kaouther ADIMI de nous montrer, au milieu des hommes capables et coupables d’ignominie un homme seul qui se lève pour s’opposer à eux. Livre à lire d’urgence par tous ceux et celles qui aiment les livres mais aussi … par tous ceux qui ne les aiment pas « Peu de gens le savent mais je n’aimais pas lire et je ne suis toujours pas certain d’aimer cela aujourd’hui [… ], mais j’aime être entouré de livres. [… ] Un livre ça se touche ça se sent » dit le gardien de la librairie. IL faut lire ce livre pour défendre les livres ! Chaque livre qu’on le lise ou qu’on le sente ou qu’on le touche sans le lire est une force assez puissante pour faire reculer l’obscurantisme.
![LA VIE DEVANT SOI .png](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_d5f438f5bd784f34b58b04e18c13bbf7~mv2.png/v1/fill/w_157,h_217,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/LA%20VIE%20DEVANT%20SOI%20.png)
LA VIE DEVANT SOI d’Émile Ajar
Romain Gary (1914-1980) qui fut successivement aviateur, militaire, résistant, scénariste, réalisateur, écrivain décide d’écrire plusieurs livres sous une fausse identité, mystifiant ainsi tout le milieu littéraire. C’est le seul écrivain à avoir reçu deux fois le prix Goncourt. Sous le nom de Roman Gary en 1956 pour « Les Racines du ciel. » Sous le nom d’Émile Ajar en 1975 pour « La vie devant soi. »
Dans « La vie devant soi » Momo un tout jeune garçon placé dans une pension pour enfants de prostituées raconte son histoire ainsi que celle de madame Rosa la gérante de la pension.
La pension se trouve dans un quartier parisien où cohabitent juifs, musulmans, chrétiens, noirs, blancs sans aucune discrimination sociale, raciale, religieuse, sexiste. Bien plus, quand madame Rosa se trouve en grande difficulté on constate que la solidarité n’est pas un mot vain.
Le style d’Émile Ajar (Romain Gary) transcende le récit, déjà très riche de sens et en fait tout le charme. L’auteur use de raccourcis saisissants, d’images fulgurantes, il bouscule et télescope la logique, faisant « se rencontrer des mots et des idées qui ne se connaissent pas. » Quelques exemples…
« Pendant longtemps je n’ai pas su que j’étais arabe parce que personne ne m’insultait »
« Elle a eu l’idée d’ouvrir une pension sans famille. »
« Je ne me battais jamais, ça fait toujours mal quand on frappe quelqu’un. »
« Il ne fallait pas l’embêter quand elle pleurait car c’était ses meilleurs moments. »
« Moi l’héroïne je crache dessus. Les mômes qui se piquent deviennent tous habitués au bonheur et ça ne pardonne pas vu que le bonheur est connu pour ses états de manque. »
C’est un livre à la fois poétique et prosaïque, tragique et comique, léger et profond. Je vous invite à lire (ou à relire ce livre) pour le charisme et la densité des personnages ainsi que pour l’émotion et l’optimisme qu’il génère. Même quand les valeurs conventionnelles sont chahutées, la morale résiste. Les hommes, les femmes et les enfants de cette histoire vivent debout. La toute dernière phrase du livre est : « Il faut aimer. »
![Capture d’écran 2017-06-15 à 04.47.31.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_9396cd96a78844d08c60cfd6dd52cd00~mv2.png/v1/fill/w_147,h_216,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-06-15%20%C3%A0%2004_47_31_pn.png)
AGUS Miléna, « MAL DE PIERRES », roman.
Milena AGUS née en 1959 enseignante à Cagliari (Sardaigne) est aussi romancière. Auteur de plusieurs romans dont le plus connu est « Mal de pierres »
Que nous dit ce livre ?
Ce court roman raconte l’histoire d’une famille sur trois générations et plus particulièrement celle de la grand-mère de la locutrice. Cette grand- mère est l’axe central autour duquel s’articule et se cristallise le récit. L’histoire met en évidence les interactions entre les différents personnages pour la plupart membres de la famille : arrière-grand-mère, père, mère, cousins, cousines, oncles, tantes mais il y a aussi un amant en marge de cette famille qui joue un rôle déterminant. On sent l’importance de chacun dans ce milieu encore soumis aux traditions ancestrales ; il y a une recherche d’équilibre entre le changement des mœurs auquel certains aspirent et la prégnance des traditions qui s’acharnent à laisser les choses en l’état. La recherche de cet équilibre est aussi (et surtout) la quête du bonheur. Sans le dire ce livre est un roman à suspens qui nous réserve une belle surprise finale.
Le style est conforme au cheminement parfois un peu chaotique de l’esprit et du cœur des protagonistes. Les mots ici ne sont pas un assemblage lisse et calculé, ils ont la spontanéité de la vie laquelle chahute souvent la grammaire dont la syntaxe et le vocabulaire.
Pourquoi lire « Mal de pierres ? »
Il montre le combat à la fois ordinaire et courageux (et qui souvent ne manque pas d’humour) d’une femme pour la liberté et pour l’amour, pour l’amour dans la liberté, pour la liberté dans l’amour contre la soumission au totalitarisme des traditions dont la tradition machiste et la tradition religieuse « Alors si Dieu ne voulait pas lui révéler l’amour, il n’avait qu’à la faire mourir d’une façon ou d’une autre.»
Ce livre est bien entendu un plaidoyer contre l’obscurantisme pour la connaissance dans la liberté pour la liberté dans la connaissance
Il montre la puissance du rêve et de la volonté pour faire plier la réalité : ce sont les concepts qui doivent s’adapter à la vie et non l’inverse.
Il montre toutes les facettes de l’amour : Eros : l’amour charnel, ses exubérances, ses débordements, ses jubilations ; Philia : le calme de la tendresse et de l’affection ; Agapè : la détermination de l’altruisme, de la générosité sans attente de rétribution. L’héroïne définit cet amour comme étant « La fameuse chose principale.»
« Ce que la femme veut pour les hommes et pour la vie », pourrait être un sous-titre à ce livre écrit par une femme pour les femmes et (peut-être surtout) pour les hommes.
![eleph_island_à_impimer__.png](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_c38d7fa2afd949ed92cff422f9f8f96e~mv2.png/v1/fill/w_135,h_188,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/eleph_island_%C3%A0_impimer__.png)
ELEPHANT ISLAND de Luc BABA
De nationalité belge Luc Baba est né en 1970. Chanteur, comédien, animateur d’ateliers d’écriture, dramaturge, professeur d’anglais. Écrivain, il est l’auteur d’une vingtaine de livres dont plusieurs ont été primés.
Ce livre raconte l’histoire d’une fratrie de quatre enfants : deux filles et deux garçons dont on suivra l’itinéraire chaotique et douloureux pendant la guerre de 14-18 puis bien au-delà jusqu’à la génération suivante. La vie de cette famille bascule quand, le père tué à la guerre de 14-18, la mère doit se résoudre à se séparer de ses enfants pour qu’ils ne meurent pas de faim.
On suivra particulièrement le parcours de l’un des garçons placé dans un orphelinat.
« […] je trouvai ma mère courbée, les mains croisées sur son ventre répétant sans me regarder qu’elle ne trouvait plus assez de force en elle pour nous quatre. […] le lendemain de mes sept ans elle prit sa décision. »
À l’orphelinat l’enfant entre dans un monde de brimades, d’humiliations, de violence où les adultes aigres et hargneux, à de rares exceptions près, ont une attitude antinomique de toute pédagogie bienveillante. Certes souvent racontée dans des livres et montrée dans des films, le plus récent étant « Les choristes » la vie de l’orphelinat témoigne ici, une fois de plus - en aucun cas ce n’est une fois de trop - de ce qu’est une vie « de souffrance » et de la capacité de chacun à l’endurer en essayant d’une part d’identifier, tant bien que mal, l’origine des maux et surtout à s’évader pour échapper à la misère matérielle, intellectuelle et morale.
« Nous dûmes apprendre le silence dans le corridor, à genoux sur une latte de fer, et les mains sur la tête apprendre le pire du silence, en apprendre la laideur et le manque, sans décor. »
Pour sortir du cercle vicieux de la souffrance…
Il y a le rêve … « […] je pressentais que je rêverais toute ma vie de survivre à un naufrage. »
Il y a la volonté de partir… « […] je suis retourné dans la cour avec une tête de proue, habité par la décision très claire de m’enfuir. »
Il y a le désir d’écrire même si l’écriture est source de désillusions… « […] j’ai admis qu’on ne guérit pas de tout et qu’on ne sauve personne. »
Il y a l’amour de la famille celle dont on est issu et celle que l’on construit.
Il y a enfin la paix retrouvée après tant de luttes douloureuses … « Il existe encore des bagnes pour enfants […] des orphelinats où les mômes sont humiliés. Il existe des femmes et des hommes qui condamneront cela et abattront les murs. Mais j’ai déposé mes valises pou vivre quelques années. »
Ce livre est à lire parce qu’il éclaire un chemin : celui de ces êtres profondément humains qui, confrontés aux pires situations, s’évadent de leur prison, quelle qu’elle soit, et s’acharnent à vivre la tête haute et le cœur ouvert aux autres et cela même s’ils ne prennent pas le bateau qu’ils veulent pour rejoindre « l’île aux éléphants » Ce livre est à lire pour ne pas désespérer de la vie et des Hommes.
« N’annonce jamais de triste nouvelle sans allumer un petit feu d’espoir, jamais ! »
![BARBIER .png](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_bc3196d14f1d4affa8671df6316fb71b~mv2.png/v1/fill/w_151,h_219,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/BARBIER%20.png)
TALONS AIGUILLE POUR UN 4000 de Christine BARBIER, roman
Ancienne journaliste, Christine Barbier a écrit plusieurs livres dont entre autres les Contamines au fil du temps, Des hameaux et des homme. Rendez-vous à San Marco. Elle est présidente de l’association « Les Auteurs du Mont-Blanc.
Ce livre pourrait avoir pour sous-titre « S’adapter ou partir. » Chloé, le personnage principal du récit, est une citadine que rien ne prédestine à la montagne. Elle s’installe dans ce qui était, avant l’émergence du tourisme, un village paysan de moyenne montagne et qui s’est transmué aujourd’hui - comme de nombreux village de ce genre - en une « station de tourisme » aux offres touristiques multiples dont certaines n’ont rien à voir avec la montagne.
Le premier fil conducteur du livre se trouve dans la confrontation entre la montagne naturelle et la montagne touristique. Le livre met en lumière la tendance contradictoire pour ne pas dire schizophrénique de nombreux villageois à demeurer des montagnards ancrés dans leur territoire (leur pays) tout en étant des agents touristiques performants. Le second fil est la difficulté que Chloé rencontre dans un milieu rude et parfois hostile pour trouver les clés qui lui ouvriraient les portes du village devenu une station. Exilée de Paris elle veut retrouver un « pays », un pays qui serait le sien, ou du moins qui l’accueillerait comme une enfant « du pays.»
Grâce à sa fonction de journaliste de terrain elle se fait lentement accepter » et même « intégrer» car dans ses articles elle sait mettre en lumière les différents aspects du village- station et de la montagne qui en est son écrin.
Le troisième fil du livre est la montagne. Malgré son âpreté elle l’aime ! En la parcourant seule ou avec ses amis guides elle nous en révèle les beautés et à quel point elle peut aider à vivre mieux et à vivre plus.
Le quatrième fil est la vie personnelle de Chloé. C’est une femme qui cherche à vivre en harmonie avec sa famille proche ou lointaine et aussi avec son compagnon qui connaît lui aussi des difficultés, non pas des difficultés d’adaptation à la vie dans la vallée mais à la vie tout court.
On trouve ici deux formes d’écriture : principalement une forme narrative et journalistique et moins souvent une forme évocatrice et poétique, très belle. Une troisième forme heureusement ne fait que de rares apparitions, c’est ce qu’on pourrait appeler une forme « folklorisée » d’un langage montagnard qui autrefois fut naturel comme le fut la montagne elle-même.
Dans ce coin de montagne à la fois isolé et saturé de tourisme Chloé éprouve le besoin de s’évader pour aller dans des contrées demeurées naturelles et encore sauvages en Italie et en Sardaigne notamment. Ce récit de vie est aussi un roman à suspens. Où vivra Chloé demain ? Le lecteur peut imaginer une suite en voulant pour l’héroïne et ceux et celles qui l’accompagnent une vie harmonieuse et sereine. Chloé nous ouvre une piste dans les dernières lignes du livre. « […] Un songe géant s’étendit au-dessus d’elle et l’emmena voler par delà les montagnes […] un songe d’yeux qui se parlent et de mains qui se cherchent un songe de « pars avec moi et d’architectures lointaines. Chloé sourit au bonheur invisible et ferma les yeux sur l’éternité éphémère de l’instant. »
Ce livre dépasse très largement le cadre de la montagne. Il nous parle du tiraillement constant que chaque homme et chaque femme lucide, où qu’il soit et quoi qu’il fasse, éprouve et vit au quotidien entre ses rêves et la réalité, entre l’artificiel et le naturel.
Émouvant et profondément humain « Talons aiguilles pour un 4000 » est à lire par tous les montagnards qui ayant encore de la terre à leurs chaussures ne veulent pas que leur pays se « disneylandise », par tous ceux qui par nécessité ou goût vivent du tourisme, et aussi, bien sûr, par tous ceux et celles qui aiment la montagne… et la vie !
![couv_le_défi__.png](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_e63e800651a94ab98d552e0039186d4a~mv2.png/v1/fill/w_134,h_192,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/couv_le_d%C3%A9fi__.png)
LE PLUS GRAND DÉFI DE L’HISTOIRE DE L’HUMANITÉ, Aurélien BARRAU
Aurélien Barrau est astrophysicien et docteur en philosophie. Lauréat de plusieurs prix scientifiques, il a écrit de nombreux articles et livres. Par ses écrits et ses actes il milite pour la sauvegarde de la vie.
Dans ce livre il nous montre en tant que philosophe et nous démontre en tant que scientifique que nous entrons « dans une période de catastrophe planétaire.»
Des constats …
« Chaque année la surface des villes progressent d’environ 400 millions de mètres carrés. » « Il y a une telle perte de la biodiversité qu’il n’est plus évident que la surface terrestre puisse matériellement continuer à subvenir aux besoins des hommes. » « Mille milliards d’animaux marins sont tués chaque année. » « Le rythme de extinctions dans 30 ans sera de 100 à 1000 fois supérieur à la normale. » « La concentration de CO2 croit sans arrêt. » « Trois milliards de tonnes de déchets sont produits chaque année, dont 250 millions de tonnes de déchets plastique. » « Plus de 81 % des déchets ne sont ni recyclés ni compostés. » « Chaque année 80 000 km carrés de forêt disparaissent » « On tue à peu près cent milliards d’animaux terrestres par an à des fins alimentaires. » « Il y a chaque année 89 millions d’êtres humains de plus à nourrir. » Plus l’espèce humaine se développe et plus les autres espèces végétales et animales régressent. L’hécatombe est terrifiante. Avec comme conséquence tout aussi terrifiante : la baisse de la biodiversité. « La sixième extinction massive de l’histoire de la Terre est en cours », la première provoquée par l’homme, les cinq autres étant dues à des causes naturelles (séismes, éruptions, météorites, volcanisme… )
Des préconisations …
Aurélien Barrau nous dit que nous devons prendre conscience que les êtres vivants - végétaux et animaux - au milieu desquels nous vivons et dont nous faisons partie ne sont pas des « choses » à exploiter mais des « vies » à protéger. Bref, il nous faut enfin comprendre que la vie, quelle qu’elle soit, est sacrée.
Pour infléchir le processus d’autodestruction dans lequel l’humanité s’est engagée depuis l’époque des chasseurs-cueilleurs (il y a deux millions d’années) on ne peut pas se contenter de prendre des mesures ponctuelles, il faut de toute urgence réorienter en totalité l’organisation économique, politique et juridique de notre civilisation et notamment sortir de l’ère de la consommation et du tout à jeter pour entrer dans une période de décroissance. C’est une véritable révolution qu’il faut faire.
« Il n’est pas question de faire table rase du passé. L’humanité a produit des chefs-d’œuvre et a acquis d’extraordinaires connaissances. Le point de rupture que nous atteignons n’est ni un point de rebroussement ni un retour un départ. Il est une discontinuité. […] Les violences insidieuses (sociales, sexistes, racistes, etc.) peuvent être déconstruites dans le même geste que celui qui impose de révolutionner notre être-à-la- Terre. […] N’ayons pas peur de cette révolution […] Elle peut contribuer à ouvrir sur une économie de l’amour en lieu et place d’une gestion de la finance. […] L’amour n’est pas un ressenti, il est une exigence. »
« La tâche est immense et le temps presse. Si le génie humain existe, c’est ici et maintenant qu’il doit se manifester. » Ce livre est à lire par tous ceux et celles qui veulent sauver le monde !!! Projet démesuré mais il n’y en a pas d’autre !!!
![Capture d’écran 2017-07-01 à 03.21.27.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_29529d6074924393905977290a46b42c~mv2.png/v1/fill/w_141,h_224,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-07-01%20%C3%A0%2003_21_27_pn.png)
« COMMENT PARLER DES LIVRES QUE L’ON N’A PAS LUS ? », essai de Pierre BAYARD
Pierre BAYARD, né en 1954 est professeur de littérature et psychanalyste. Théoricien de la littérature, il lit en permanence et écrit principalement des essais sur la littérature avec chaque fois un regard décalé (un regard de renard : on dirait qu’il regarde ailleurs mais il ne perd jamais sa proie des yeux.)
Que nous dit ce livre ?
Contrairement à ce que nous dit le titre ce n’est pas un livre qui incite à ne pas lire, c’est un livre qui invite à lire mieux !!! L’auteur établit quatre catégories de livres. Les livres que l’on ne connaît pas. Les livres que l’on parcourt. Les livres dont on entend parler. Les livres que l’on oublie. Pierre Bayard cite le cas d’un personnage de Musil, docteur de l’université, qui dirige une immense bibliothèque. Il dit à son visiteur : « Vous voulez savoir comment je puis connaître chacun de ces livres : c’est parce que je n’en lis aucun. [… ] À l’exception des catalogues. » Par amour de tous les livres, le bibliothécaire s’interdit d’en exclure aucun. « Les personnes cultivées le savent - et surtout pour leur malheur les personnes non cultivées l’ignorent – la culture est d’abord une affaire d’orientation. Être cultivé, ce n’est pas avoir lu tel ou tel livre, c’est savoir se repérer dans leur ensemble, donc savoir qu’ils forment un ensemble et être en mesure de situer chaque élément par rapport aux autres. »
Pourquoi lire « COMMENT PARLER DES LIVRES QUE L’ON N’A PAS LUS ? »
Il faut lire ce livre non pour rassurer ceux qui ne lisent pas mais au contraire pour inquiéter ceux qui lisent.
Lire un livre ligne à ligne et mot à mot ne suffit pas ! Il faut découvrir s’il y a matière à lire et si oui pénétrer dans la substance même de cette matière. Sinon il faut passer à un autre livre.
« Pour un vrai lecteur, soucieux de réfléchir à la littérature, ce n’est pas tel livre qui compte, mais l’ensemble de tous les autres et prêter une attention exclusive à un seul risque de faire perdre de vue cet ensemble et ce qui, en tout livre, participe à une organisation plus vaste qui permet de le comprendre en profondeur. »
On ne peut établir un système où la littérature serait le but et le livre le moyen. Cela serait dériver vers une sorte de totalitarisme littéraire. Tout livre a son importance même le plus modeste et même le plus insignifiant. Dans ce cas il faut avoir la lucidité d’admettre que dans ce cas c’est l’insignifiance qui devient l’importance. On peut par exemple, situer « Le Grand Meaulnes » à une place modeste, discrète voire invisible dans la littérature mais si ce livre est le premier dans le cœur d’un lecteur qu’importe si ce lecteur ne le situe pas au sommet de la hiérarchie de la littérature si tant est que cette hiérarchie existe. Cela dit…
Plus on lit et mieux on lit ! On découvre que certains livres ont du corps, de la substance, une âme et d’autres non.
Lire avec son esprit n’empêche pas lire avec son cœur.
Ne pas être un goinfre mais un gourmand de lectures.
Ne se soustraire à aucun livre pour ne laisser aucun livre nous soustraire à la lecture.
L’objet de chaque livre est de nous aider à mieux comprendre et à mieux vivre notre vie.
![Capture d’écran 2018-04-17 à 08.21.44.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_5f8d6be0999348a2989d5ef9df7fd26b~mv2.png/v1/fill/w_145,h_216,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202018-04-17%20%C3%A0%2008_21_44_pn.png)
« PLAIDOYER POUR LA FRATERNITÉ d’Abbdennour BIDAR, essai
Abdennour BIDAR, agrégé et docteur en philosophie a été enseignant pendant vingt ans. Auteur de nombreux ouvrages humanistes, il est actuellement chargé de mission au ministère de l’Éducation Nationale.
Dans « Plaidoyer pour la fraternité » l’auteur s’attache à montrer que la fraternité est cet espace immense et paisible où doit se construire le monde unifié de demain au-delà clivages ethniques, religieux et culturels. Un constat
Tous les fanatismes (le fanatisme catholique ancien, le fanatisme islamiste contemporain, notamment) plaçant leurs idées au-dessus de la vie ôtent la vie « sans état d’âme » à tous ceux qui ne partagent pas l’idéologie qu’ils prêchent. Aujourd’hui l’islamisme qu’on dit « radical » veut instaurer un régime totalitaire par la terreur en ensanglantant le monde de leurs attentats, tous plus horribles et sordides les uns que les autres. P 18 « Comment en est-on arrivé là ? » demande l’auteur. Lointaines ou proches toutes les causes sont intriquées dont en particulier la diabolique union de l’islamisme religieux et de l’islamisme politique.
Que faire ?
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Ce constat étant établi le livre se préoccupe de ce que nous pouvons faire pour éradiquercette folie mortifère. P25 «
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On n’acquiert pas la fraternité à la naissance mais on la construit au jour le jour. C’est un travail d’écoute et de dialogue avec les autres rarement facile mais toujours valorisant et le plus souvent jubilatoire.
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Nous devons travailler p 40
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Il faut soutenir l’école laïque de la République lieu de diffusion des connaissances qui permet le tissage du lien social et l’intégration de tous et de toutes. La France est ce pays […] dont La laïcité seule ne suffit pas il faut lui associer
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Les religions et en particulier l’islam doivent faire leur autocritique pour bien connaître
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Ne pas tomber dans le cercle vicieux qui consiste à dire d’un côté et de l’autre
Propositions concrètes de l’auteur
Inverser l’ordre dans le triptyque « Liberté Égalité. Fraternité » : la Fraternité est la cause, la Liberté et l’Égalité sont les effets. Créer un ministère de la Fraternité. Supprimer les ghettos. Organiser des États généraux de la pensée de l’Islam. Centrer la morale de l’École sur la culture de la Fraternité. Apprendre aux élèves à débattre sur les valeurs. Instituer un service civique obligatoire. Changer la culture du monde du travail. Retrouver l’esprit des mouvements d’éducation populaire. Relancer le débat sur l’idée d’un « revenu citoyen » minimal. Créer des espaces de Fraternité dans les quartiers et communes.
« Et moi que puis-je faire pour la fraternité ? » Tel est la question que nous pose ce livre. Réponse en apparence claire et facile : il suffit d’aimer ! Mais chacun sait que l’amour est tout sauf facile. Aimer requiert un double effort : un effort d’attention aux autres et un effort de connaissance des autres. C’est dans le terreau de l’attention et de la connaissance que la fraternité s’enracine et fructifie.
![Capture d’écran 2017-06-08 à 11.52.10.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_34d4872b5dca472484d314b747e6f3eb~mv2.png/v1/fill/w_147,h_228,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-06-08%20%C3%A0%2011_52_10_pn.png)
Pierre BOURDIEU « SUR LA TÉLÉVISION » , essai
L’auteur
Pierre Bourdieu (1930-2002) Le plus important sociologue du XXème siècle. Il nous explique que le monde social est composé de « champs » : champ politique, champ artistique, etc. Dans ces champs, la société régie par des facteurs culturels et symboliques fonctionne avec des mécanismes de hiérarchie et de domination d’une grande violence. Il développe une théorie de l’action et de la socialisation par l’action.
Le contenu
La télévision qui devrait être un formidable outil au service de la connaissance est aujourd’hui une machine qui fabrique et diffuse l’obscurantisme.
Les évènements ne sont pas montrés en fonction de leur importance mais parce qu’ils sont divertissants. Qu’il s’agisse du nombre de morts que fait une guerre ou le résultat d’un match de football ce n’est pas la nature du fait qui compte mais son caractère spectaculaire.
Le quantitatif. La télévision ratisse large. Tout ce qu’elle montre a pour objectif de faire progresser l’audimat. Ce n’est pas le qualitatif qu’elle vise mais le quantitatif.
L’égo doctrinaire et totalitaire. Haut lieu de l’expression narcissique la télévision nous dit que « pour être il faut être perçu » « Passer à la télévision » c’est se montrer à des millions de gens, c’est exister.
On n’a pas le temps de penser. À la télévision le temps c’est de l’argent, chaque seconde d’émission coûte une fortune. On ne pense pas dans l’urgence : toute forme de pensée est donc anéantie. À la télévision on montre mais on ne pense pas.
Le catch truqué. Les débats sont des combats de catch arrangés et mis en scène : il y a toujours le bon, la bête et le truand. Dans les débats télévisés, le gagnant n’est pas celui qui pense le mieux mais celui qui joue le mieux, le plus spectaculaire, celui qui réussit le mieux son « numéro.».
Pourquoi lire « Sur la télévision » ?
Pierre Bourdieu écrit « […] j’espère contribuer à donner des outils ou des armes à tous ceux qui […] combattent pour ce qui aurait pu devenir un extraordinaire instrument de démocratie directe ne se convertisse pas en instrument d’oppression symbolique. »
Il faut lire ce petit (mais si important) livre pour comprendre que nous avons la liberté d’éteindre la télévision quand elle nous abêtit, nous distrait et nous soustrait au monde et que nous pouvons la regarder si toutefois elle nous enrichit et nous aide à mieux vivre dans le monde.
Ce livre est à lire par tous ceux qui aiment et tous ceux qui détestent la télévision. On ne doit pas rester indifférent devant la télévision. La télévision est ce que nous voulons qu’elle soit !
![FAHRENHEIT 451.png](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_70bb30f903ed4c079f63abc8e9dc7ed3~mv2.png/v1/fill/w_138,h_223,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/FAHRENHEIT%20451.png)
Ray BRADBURY, FAHRENHEIT 451, Roman de science fiction.
L’auteur et son œuvre
Raymond Douglas BRADBURY(1920-2012) issu d’un milieu modeste est un écrivain américain spécialiste de la science fiction d’anticipation. Après ses études secondaires il ne va pas à l’université et fait des petits boulots. Il se cultive en lisant à la bibliothèque. Il commence à écrire très jeune et publie sa première nouvelle à l’âge de dix-sept ans. Il devient écrivain à plein temps à vingt deux ans. Titulaire d’une dizaine de prix. Auteur d’une cinquantaine de livres dont la moitié au moins ont été adaptés au cinéma ou à la télévision.
Le contenu
Fahrenheit 451 est la température à laquelle un livre s’enflamme et se consume. Ce livre raconte l’histoire d’une ville où il est criminel de lire les livres et où les pompiers les brûlent. Réduire en cendres les livres, les bibliothèques, les maisons qui les abritent et si nécessaire ceux qui possèdent des livres et les lisent … telle est la mission de ces pompiers d’un nouveau genre.
Guy Montag est un pompier à qui sa fonction d’incendiaire a longtemps procuré une intense jouissance « C’est un chic boulot. Le lundi brûler Millay, le mercredi Whitmann, le vendredi Faulkner, les mettre en cendres. » Mais Montag change lorsqu’il découvre la réalité des livres, la richesse de leur contenu et le bonheur de les lire. Il change de camp. Fahrenheit 451 est l’histoire de sa résistance et de sa révolte.
Pourquoi lire FAHRENHEIT 451 ?
En moins de 200 pages, ce roman à thèse au suspens rythmé parle de la destruction des livres donc de la destruction de la connaissance et de la montée de l’obscurantisme. Cette fiction écrite en 1953 montre un danger à venir. Il ne faudrait pas que les autodafés de Fahrenheit 451 soient le signe avant coureur des autodafés que prépareraient les générations qui viennent. La disparition du livre pourrait être sans gravité, si venaient s’y substituer d’autres modes de diffusion du savoir. Le numérique, par exemple, pourrait remplacer le papier comme le papier a remplacé l’oralité. Des sujets d’inquiétude qu’il faut souligner …
La marchandisation des livres crée un nivellement par le bas et obscurcit le paysage de la connaissance.
Aujourd’hui l’image devenue doctrinaire a tendance à « ringardiser » l’écriture.
Le « zapping » nuit gravement à la santé mentale : on ne prend plus le temps de lire lentement et en totalité : on ne lit pas un livre on le parcourt !
L’avenir de la civilisation des lumières est incertain.
Le héro de Fahrenheit 451 nous incite à résister !
![Capture d’écran 2017-06-15 à 05.42.44.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_84d37e99d12d44edad6c990500bff51a~mv2.png/v1/fill/w_148,h_216,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-06-15%20%C3%A0%2005_42_44_pn.png)
Dino BUZZATI, LE DESERT DES TARTARES, Roman.
L’auteur et son œuvre
Dino Buzzati (1906-1972) journaliste, peintre, critique d’art, essayiste italien auteur de près de cinquante ouvrages : romans, nouvelles, poésie dont le plus connu est sans doute « Le désert des Tartares.» Son activité journalistique a influencé son activité d’écrivain. L’imaginaire se lie au réel et c’est par un vocabulaire simple et concret qu’il s’exprime le mieux. Un thème récurrent chez lui est le temps qui passe inéluctable et dans lequel on est comme englué et impuissant.
Le contenu
Un soldat, le lieutenant Drogo est affecté dans un fort militaire totalement isolé dans des montagnes inhospitalières au-dessus d’un immense plateau désert. Les militaires affectés à ce fort doivent surveiller jour et nuit ce désert pour contrer une hypothétique invasion de non moins hypothétiques ennemis. Oppressé par la solitude, Drogo veut repartir à peine arrivé parce qu’au fond de lui il sait que, même s’il noue des relations cordiales avec les autres officiers de la garnison, la vie qu’il va mener ici n’a pas de sens. Il le sait mais il reste attendant de se couvrir de gloire quand il repoussera les ennemis venus pour les envahir. « Dans ce fort, le formalisme militaire semblait avoir créé un chef d’œuvre insensé. Des centaines d’hommes pour garder un col par lequel ne passerait personne. » « Tout était ici renoncement mais au profit de qui au profit de quel bien mystérieux ? »
Pourquoi lire « Le désert des Tartares » ?
Écrit il y a plus d’un demi siècle, « Le désert des Tartares » nous pose plusieurs questions sur le sens (ou le non sens) de la vie. Sommes-nous libres de vivre notre propre vie ? Que faisons nous du temps qui passe ? Qu’est ce qu’une vie qui se passe à attendre la reconnaissance, une augmentation, une promotion ? À quel moment passe-t-on de la révolte à la résignation, de la résignation à l’acceptation, de l’acceptation au bonheur ? Faut-il se résigner ? Faut-il accepter ? Faut-il résister ? Ce livre est comme une horloge qui nous fait entendre son tictac entêté et inexorable. « La page de son enfance est tournée. Au-dessus de la ville il se retourne une dernière fois pour voir sa maison et la fenêtre de sa chambre : « oh ! certainement (sa mère) se figurait pouvoir conserver à jamais un bonheur à jamais disparu, pouvoir arrêter la fuite du temps […] » « Mais à un certain point, presque instinctivement on se retourne et l’on voit qu’un portail s’est refermé derrière vous, barrant le chemin de retour. »
En complément on peut lire les ouvrages qui ont inspiré l’auteur ou qui, publiés plus tard sont liés à sa philosophie. Thomas Mann : La montagne magique (1924) ; Kafka : Le château (1926) ; Sartre : La nausée (1938) ; Camus : L’étranger (1942) ou encore le mythe de Sisyphe (1942) ; Julien Gracq : Le rivage des Syrtes(1951).
![LA PESTE .png](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_67116362a83141379d83b0f08061521a~mv2.png/v1/fill/w_144,h_232,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/LA%20PESTE%20.png)
LA PESTE
Ce roman raconte l’histoire d’une ville dévastée par la peste, maladie éminemment contagieuse et dangereuse propagée par les rats. Cette épidémie révèle et exacerbe un certain nombre de sentiments et de vertus chez les habitants de la ville qu’elle ravage.
Il y a d’abord la peur de la souffrance et de la mort. Puis, quand le gouvernement porte atteinte aux libertés des citoyens pour les protéger, viennent la colère et la révolte.
Si certains se révoltent, d’autres se soumettent et se résignent. « La peste leur apparaitrait comme la forme même de leur vie et où ils oublieraient l’existence que, jusqu’à elle, ils avaient pu mener. Mais qu’est ce que ça veut dire la peste ? C’est la vie voilà tout. »
On découvre les limites de la pitié ainsi que les dangers que courent l’amitié et l’amour. « On se fatigue de la pitié quand la pitié est inutile.» « La peste avait enlevé à tous le pouvoir de l’amour et même de l’amitié. Car l’amour demande un peu d’avenir, et il n’y avait plus pour nous que des instants. »
Face au fléau les citoyens s’accrochent à ce qu’ils peuvent. Faute de savoir certains se mettent à croire à tout et à n’importe quoi ouvrant ainsi la porte à l’obscurantisme avec ses séquelles terrifiantes que sont les totalitarismes politiques, culturels et religieux, des pestes intellectuelles et morales elles aussi éminemment contagieuses et dangereuses contre lesquels il faut lutter sans cesse car « le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais. »
Il faut lire (ou le relire) « La peste », une histoire qui nous incite à résister au mal sous toutes ses formes en restant optimiste, l’optimisme étant l’autre nom de la volonté de vivre. C’est pour exprimer cette volonté de vivre que cette histoire nous est racontée et aussi « pour laisser un souvenir de l’injustice et de la violence qui leur avaient été faites et pour dire simplement ce qu’on apprend au milieu des fléaux, qu’il y a dans les hommes plus de choses à admirer que de choses à mépriser. »
Ce roman qui nous parle d’une épidémie d’hier, nous aide à mieux comprendre et à mieux vivre l’épidémie qui nous affecte aujourd’hui.
ALBERT CAMUS (1913-1960) - Ensemble de l'Oeuvre
Albert Camus
Né en Algérie le 7 novembre 1913, mort dans un accident de voiture le 4 janvier 1960, prix Nobel de littérature en 1957, Albert Camus, penseur d’exception, utilise avec le même génie un grand nombre de genres littéraires : essais, articles, romans, correspondances, pièces de théâtre. Albert Camus est issu d’un milieu aussi pauvre matériellement qu’intellectuellement. C’est sa grand-mère, femme autoritaire et violente, qui est le véritable chef de famille. Sa mère, femme de ménage, est pratiquement illettrée. Il lui voue un amour inconditionnel. Son père est mort au tout début de la guerre de 14-18.
La philosophie d’Albert Camus
La non violence. Son père, bien qu’il ne l’ait pas connu, a eu sur lui une influence morale décisive. Resteront à jamais gravées en lui les paroles simples de ce père inculte qui dit après avoir assisté à une exécution par décapitation : « Non ! Un homme ça s’empêche… Voilà ce qu’est un homme ou sinon…Il y a des Français qui ne s’empêchent pas… Alors eux non plus ce ne sont pas des hommes. » ( Le premier homme.) Ces quelques mots contre la monstruosité de la guerre et de la peine capitale serviront de socle fondateur à la philosophie de la non violence et de la justice chez Camus.
Le bien et le mal. « La révolte bute inlassablement contre le mal à partir duquel il ne lui reste plus qu’à prendre un nouvel élan […] Dans son plus grand effort, l’homme ne peut que se proposer de diminuer arithmétiquement la douleur du monde. Mais l’injustice et la souffrance demeureront et, si limitées soient-elles elles ne cesseront pas d’être scandale […] l’art et la révolte ne mourrons qu’avec le dernier homme. » (L’homme révolté.)
L’absurde Sa philosophie ne nous demande ni de rêver ni d’espérer, elle manifeste l’exigence d’une action dont l’objectif est de donner à chacun les moyens d’inventer un sens à la vie pour lui-même mais pour lui-même avec les autres. Il nous dit que, n’ayant ni cause première ni finalité dernière, la vie est absurde. Il nous dit aussi (et surtout) que vivre c’est surmonter l’absurde pour vivre aussi heureux et sage qu’il est possible de l’être. « L’homme est périssable. Il se peut ; mais périssons en résistant, et si le néant nous est réservé, ne faisons pas que ce soit une justice. » Cette phrase de Sénancour (1770-1846) résume bien la position de Camus, philosophe de la révolte.
Pourquoi lire Albert Camus ?
L’un des auteurs le plus lu dans le monde, Albert Camus tire l’homme vers ce qu’il devrait être : un humaniste aimant les autres, aimant ce qui est beau, moral et juste. Il dit : « Pendant plus de vingt ans d'une histoire démentielle, perdu sans secours, comme tous les hommes de mon âge, dans les convulsions du temps, j'ai été soutenu ainsi par le sentiment obscur qu'écrire était aujourd'hui un honneur, parce que cet acte obligeait, et obligeait à ne pas écrire seulement. Il m'obligeait particulièrement à porter, tel que j'étais et selon mes forces, avec tous ceux qui vivaient la même histoire, le malheur et l'espérance que nous partagions.» La philosophie d’Albert Camus est une lumière dont notre monde sombre a besoin. Lisez Camus !
BIBLIOGRAPHIE (Non exhaustive.)
Noces, recueil de quatre essais, 1939
Le Mythe de Sisyphe, essai sur l’absurde, 1942
L’Étranger, roman 1942.
Lettres à un ami allemand, 1945.
La Peste, roman, 1947.
L’Homme révolté, essai, 1951.
La chute, roman, 1956.
L’Exil et le Royaume, nouvelles 1957.
Le Premier roman autobiographique posthume (1994)
Pièces de théâtre : Caligula (1938), Le Malentendu (1944), L’État de siège (1948), Les Justes (1949.)
À cela il faut ajouter les cahiers (8 tomes) et la correspondance avec jean grenier, Pascal Pia, Jean Sénac, René Char, Michel Vinaver, André Malraux et autres écrits divers, préfaces, articles, etc.
Deux biographies d’Albert Camus
Camus, Olivier TODD (Éd. Gallimard, 1996.)
L’ordre libertaire, Michel Onfray (Éd. Flammarion, 2012.°
![Capture d’écran 2018-03-09 à 09.16.31.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_e5c97bb89d8d4a369c64aa8a0acf7e21~mv2.png/v1/fill/w_121,h_177,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202018-03-09%20%C3%A0%2009_16_31_pn.png)
Isabelle CARRÉ, LES RÊVEURS, roman
Isabelle Carré est née en 1971. Elle est comédienne. César de la meilleure actrice en 2003 pour « Se souvenir des belles choses. » Molière n 1999 pour Mademoiselle Else. Molière ne 2004 pour « L’hiver sous la table » Les Rêveurs est son premier roman.
Ce livre se présente comme un roman. Il s’agit en réalité d’une fiction autobiographique, genre très à la mode depuis une ou deux décennies. C’est l’histoire d’une famille peu banale qui connaît de nombreux problèmes relationnels et d’adaptation sociale dans laquelle l’héroïne (Isabelle) porte son lot de difficultés personnelles et qui s’en sort parce que la nature l’a dotée d’un talent et qu’avec la passion et le travail elle a pu se hisser parmi les meilleures de sa profession.
Faut-il aimer le livre d’Isabelle Carré parce que nous aimons Isabelle Carré en tant que comédienne ? La réponse est évidemment non. Un tel récit aurait-il vu le jour sous la plume d’un anonyme. Là encore la réponse est non.
Ces réserves étant posées, ce livre est à lire pour plusieurs raisons.
Le déballage des problèmes personnels et familiaux d’Isabelle Carré qui, sous une forme romancée est une auto-thérapie, peut être utile aux lecteurs. Dans le fond c’est la finalité de tout livre de ce genre. Un livre qui n’est utile qu’à son auteur n’est pas un livre.
Le livre émaillé de lieux communs et de citations très ordinaires ne fait pas vraiment vibrer le lecteur. On peut dire alors : « Voilà une fille bien ordinaire qui a réalisé une carrière extraordinaire ! » Ce constat tout à l’honneur de la comédienne l’accable en tant qu’écrivain. Ce qui, bien évidemment, nous amène à nous interroger sur ce qu’est la littérature.
Le récit qui suit le cours de la mémoire de l’auteur n’est pas chronologique ce qui contraint le lecteur à éviter les ornières du factuel pour se concentrer sur les fils conducteurs thématiques.
Isabelle Carré fait l’inventaire rapide de tous les rôles qu’elle a joués au cinéma ou au théâtre. Ce qui ne serait qu’anecdotique a ici une grande importance car cela montre que toute vie est unique mais que mille vies sont possibles avec des « si. » Elle met ainsi en lumière une sagesse. Sont sages ceux qui ne s’attachent pas aux « si » mais à la vie.
Sauf exception, le style est trop appliqué et manque de spontanéité. Il y a plus d’authenticité et de fraicheur dans les extraits des cahiers de sa jeunesse qu’elle cite en fin d’ouvrage. « Dans mes cahiers, je peux lire la jeune fille que j’ai été. Comprendre pour quelles raisons elle était aussi exaltée, volontariste, si seule, et comment pour y remédier elle s’inventait sans cesse des histoires d’amour pour alléger les choses, se protéger de l’inquiétante réalité à l’aide de tous ses fantasmes. »
Les fantasmes qu’ils soient issus du stress, de l’angoisse existentielle, de l’imagination sont à maitriser et à organiser pour les exprimer et en faire des œuvres d’art et plus particulièrement des films, des pièces de théâtre, des livres.
![Capture d’écran 2017-08-07 à 09.27.36.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_bb8376e893194011a47e77cccce51927~mv2.png/v1/fill/w_145,h_235,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-08-07%20%C3%A0%2009_27_36_pn.png)
LE QUATRIÈME MUR de Sorj CHALANDON, roman
Sorj Chalandon est né en 1952 en Tunisie. Grand reporter. Journaliste à Libération puis au Canard Enchainé. Auteur d’une douzaine de livres et titulaire de presque autant de prix dont le Goncourt des lycéens en 2013, le prix de l’’Académie française en 2011, le Médicis en 2006, le prix Albert Londres en 1988.
Le quatrième mur est le récit d’un cauchemar, d’un rêve, d’une résistance et d’une fureur. Cauchemar de la guerre Rêve de paix. Résistance à l’injustice. Fureur de vivre humainement. Georges, un metteur en scène Français mandaté par un autre metteur en scène Juif et Grec, malade ne pouvant se déplacer, veut monter une pièce de théâtre (Antigone) au Liban au milieu de la guerre civile (1975-1990) guerre indissolublement liée au conflit israélo-palestinien. Composée de factions et d’ethnies diverses : Chrétiens, juifs, musulmans, chiites, sunnites, wahabites, maronites, druzes, Chaldéens, Arméniens, Palestiniens, Israéliens. Ces populations ne parviennent pas à devenir un « peuple » et elles se déchirent. Les acteurs et actrices qui ont pour projet de jouer la pièce ensemble représentent à peu près toutes les factions principales présentes au Liban. Les répétitions sont interrompues brutalement par l’attaque aérienne et terrestre massive d’Israël en septembre 1982 et les 16 et 17 septembre par le massacre monstrueux des réfugiés Palestiniens perpétré par les milices libanaises avec la complicité de Israéliens dans les camps de Sabra et Chatila.
Pourquoi lire ce livre ?
Écrit dans un style journalistique aux phrases brèves et nerveuses, ce roman réaliste fait se confronter l’utopie de l’art à la réalité de la guerre. La lecture est rude mais salubre. Dans une tragédie réelle – la guerre au Liban - une tragédie de théâtre (Antigone) doit se jouer. « Le tragique, dit le philosophe André Comte-Sponville, ce n’est pas le malheur ou le drame […] c’est […] le conflit entre les lois de l’État et celles de la conscience. » Cette confrontation entre rêve et réalité est vécue au quotidien par tous les protagonistes de l’histoire. Tous ont des orientations idéologiques différentes voire diamétralement opposées. Malgré ces divergences (sans doute à cause d’elles), ils veulent dépasser aussi bien les conflits externes qu’ils ne maitrisent pas que les conflits internes dont ils sont les maîtres. La violence montrée ici n’est ni du voyeurisme sordide ni du journalisme froid, c’est une violence humaine, absolument humaine. Ce récit sombre nous fait comprendre que dans les nuits les plus noires de l’histoire où l’on désespère de l’homme il existe toujours une lumière qu’on se doit de sauvegarder pour qu’un jour elle illumine le monde. Jusqu’à quand les hommes vont-ils se déchirer avant de construire ensemble un monde apaisé ? Toute la question est là. Le livre ne donne aucune date (!) mais il ouvre des perspectives. À chacun de les explorer.
Autres lectures en lien avec ce thème … Ce labyrinthe de déchirements politiques, religieux et idéologiques avec ses impasses, ses voies sans issue, ses fausses pistes est la concrétisation tragique du texte humoristique de Henri Michaux « Les secrets de la situation politique : soyons enfin clairs » On peut également voir ou revoir le film « No land’s song » de Ayat Najafi qui raconte l’histoire d’une femme qui veut organiser en Iran un concert de chanteuses solistes ce qui est rigoureusement interdit. Il faut lire bien sûr « Antigone » d’Anouilh. Enfin, pour remonter aux causes profondes et générales des tueries et des guerres : « Le système totalitaire » d’Hannah Arendt.
![Capture d’écran 2017-06-18 à 09.34.34.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_0c11a3507c2b4e13b4fbc3f6ad7bf743~mv2.png/v1/fill/w_131,h_211,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-06-18%20%C3%A0%2009_34_34_pn.png)
CHEVALIER Tracy, « LA JEUNE FILLE A LA PERLE », roman.
L’auteur
Tracy CHEVALIER est née en 1962. Américaine vivant en Angleterre. Spécialiste des romans historiques, elle connaît une immense notoriété internationale grâce à « La jeune fille à la perle »
Le contenu et la forme
Tracy CHEVALIER raconte l’histoire de l’improbable relation entre une servante inculte mais éminemment réceptive et sensible et le peintre Johannes VERMEER, (1632-1675), relation qui donne naissance à un tableau appelé aujourd’hui « La jeune fille à la perle » considéré souvent comme « La Joconde du Nord. » Peu productif et peu reconnu comme peintre de valeur par ses contemporains Johannes Vermeer est considéré à partir du XIXème siècle comme l’un des peintres majeurs qui marque l’histoire de la peinture.
Lorsque le peintre, sans en rien dire à personne décide de faire le portrait de sa servante cela provoque un énorme scandale pour diverses raisons. Le peintre refuse l’accès de son atelier à sa femme. La servante qui doit consacrer tout son temps à l’entretien de la maison l’aide dans la fabrication de ses couleurs. « Je préparais à contrecœur les couleurs qu’il me demandait chaque matin. » La servante est réticente à poser. « Je ne m’étais pas rendu compte qu’il me fixerait avec une telle intensité. » Elle finit par accepter et participe même activement à la création de l’œuvre. « Ce que j’appréciais par dessus-tout c’était de passer davantage de temps dans l’atelier. » Elle comprend avant le peintre ce qui manque au tableau « Percevant ce qui faisait défaut, cette petite touche de lumière… » Pour créer le point lumineux et central du tableau elle doit porter - scandale ultime - les boucles d’oreille de l’épouse ! « Une servante ça ne porte pas de perles » « Le tableau a besoin de cette lumière que reflète la perle. »
Pourquoi lire « LA JEUNE FILLE A LA PERLE » ?
Cette histoire qui dépeint l’abime social qui sépare le monde de la servitude et le monde des maitres nous touche par son actualité. Elle montre que la condition sociale n’a rien à voir avec la sensibilité artistique et créative (pour qui sait regarder le banal peut être transcendé en œuvre d’art) ni avec la force des sentiments (le maître peut aimer sa servante et réciproquement). Elle montre aussi que, quelle que soit l’époque, les clivages sociaux sont des entraves à la liberté et au bonheur et que le combat pour ces deux valeurs est un combat quotidien qui passe par les gestes et faits les plus anodins. Chacun des faits et gestes des protagonistes de cette histoire, à la fois subtile et rugueuse, est indispensable au sens de l’histoire comme est indispensable chaque touche de peinture à l’équilibre et à la beauté du tableau. Comme dans toute histoire bien construite, nous nous laissons saisir par les aléas du récit jusqu’à son dénouement. Nous vivons de la vie des personnages. Leur vie qu’elle soit triviale ou sublime nous aide à mieux vivre la nôtre.
![Capture d’écran 2017-06-08 à 11.58.27.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_a473306028c449daab8ffbf96a097925~mv2.png/v1/fill/w_138,h_195,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-06-08%20%C3%A0%2011_58_27_pn.png)
François CHENG, DE L’ÂME, essai.
L’auteur et son œuvre
François CHENG est un Français d’origine chinoise ! Né en 1929, arrivé en France en 1948, naturalisé français en 1971, élu à l’Académie français en 2002. Essayiste, romancier, poète, calligraphe, traducteur il a reçu divers prix pour ses œuvres dont le Femina en 1998 et le grand prix de la francophonie de l’Académie française en 2001.
Le contenu
« De l’âme » est une méditation sur l’existence et la nature de l’âme écrit sous la forme d’un essai épistolaire dans lequel l’auteur échange son point de vue avec celui d’une amie qui dés la première lettre (il y en aura sept) lui dit qu’elle vient de découvrir la « réalité » de son âme. S’ensuit donc un échange sur ce qu’est l’âme et comment à la fois elle interroge et anime la vie. L’âme existe-t-elle ? Si l’âme existe, est-elle à l’origine du Beau ? À l’origine du Bien ? À l’origine du savoir, de la connaissance et de la compréhension des choses et des êtres ? Est-ce l’âme qui donne un sens à la vie ? Si nous avons une âme est-elle dans notre corps ? Hors de notre corps ? Est-elle le corps lui-même ? Est-elle l’autre nom de l’esprit ? Si l’âme et l’esprit sont deux principes irréductibles l’un à l’autre quelles sont les spécificités de chacun ? Quelles sont leurs différences ? Leurs liens ? Ya-t-il une hiérarchie entre l’esprit et l’âme si tant est que les deux existent ? Existe-t-il une Âme universelle ? François Cheng pour éclairer le triptyque corps-âme-esprit cite Hildegarde de Bingen (XIIème siècle) « Le corps est le chantier de l’âme où l’esprit vient faire ses gammes. »
Le point de vue du philosophe André Comte-Sponville est différent « […] c’est l’esprit qui libère, et cela constitue, pour l’âme, le seul salut toujours inachevé. »
Pourquoi lire « De l’âme » ?
Parce que la vie est là et qu’il est « naturel » de s’interroger sur le moteur qui anime la vie ; un moteur dont les pièces principales sont le corps l’esprit et l’âme lesquels composent un tout insécable, indissociable et qui est l’unité même de notre vie. Se poser la question de l’âme est aussi nécessaire et plaisant pour l’homme que la question du corps dont le culte en notre siècle est devenu « doctrinaire. » Comprendre comment ça marche : cette curiosité est inhérente à la nature humaine ! Ce désir de la connaissance est un plaisir de la vie. Et ce plaisir de connaître devrait être aussi intense chez les matérialistes que chez les spiritualistes, aussi profonde chez les athées que chez les croyants.
« QUELQUES JOURS DANS LA VIE DE TOMAS KUSAR » roman d’Antoine CHOPLIN
(Éd. La fosse aux ours.)
L’auteur : Romancier et poète français né en 1962. Organisateur d’événements culturels. Prix « France Télévision » en 2012 pour « La nuit tombée »
Le contenu
Ce roman est une histoire d’amitié. Amitié entre des ouvriers dont, Tomas Kusar un employé des chemins de fer et Vaclav Havel, écrivain, dramaturge, opposant au régime communiste, emprisonné à ce titre, puis président de la Tchécoslovaquie de 1989 à 2003. C’est aussi une histoire de résistance contre le totalitarisme. Résistance qui finit par l’emporter grâce à l’unité du groupe d’amis et à l’enracinement populaire de la révolte. « … chacun de nous même s’il est sans pouvoir a le pouvoir de changer le monde… »
Pourquoi lire ce livre ?
C’est un livre positif, humaniste et chaleureux qui incite à l’action.
C’est un livre sur la liberté, l’égalité, la fraternité.
Livre resserré qui alterne le langage parlé incisif et un style descriptif aux phrases longues.
Livre rythmé entre les phases d’action et les moments de réflexion voire de poésie.
![Capture d’écran 2021-02-10 à 09.32.50.](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_7b679a688cf54db1a1d0e009c6fcd1a2~mv2.png/v1/fill/w_122,h_161,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99e%CC%81cran%202021-02-10%20a%CC%80%2009_32_50_.png)
SANS JAMAIS ATTEINDRE LE SOMMET de Paolo COGNETTI
Né en 1978 Paolo Cognetti est l’auteur de plusieurs livres notamment « Les huit Montagnes » qui a reçu de nombreux prix dont le prix Médicis étranger.
Ce récit de voyage se déroule au Dolpo, une contrée du Népal tout près du Tibet. C’est cette région isolée que l’auteur a décidé de traverser avec une expédition d’une cinquantaine de personnes. Peuplé d’habitants éparpillés qui vivent de presque rien dans une nature sauvage au-dessus de 4000 mètres d’altitude, le Dolpo fait partie des rares pays à l’écart de ce que l’on nomme la civilisation. Un des habitants dit qu’il est parfaitement heureux dans son dénuement et son isolement en ajoutant : « de toute façon je n’ai pas le choix ! »
Habiter cette montagne inhospitalière est un défi quotidien, la parcourir une aventure. Ce livre raconte cette aventure.
En plus de ces compagnons de voyage l’auteur est accompagné d’un livre : Le Léopard de neiges de Peter Matthiesen. Ce livre n’est pas là par hasard, il relate la quête d’un animal mythique et pourtant bien réel par un naturaliste. Cette recherche symbolise parfaitement l’état d’esprit de l’auteur parti non pour conquérir des sommets mais pour mieux connaître et comprendre la montagne ainsi que tous ceux qui la peuplent. « Depuis que j’étais allé vivre en montagne j’avais commencé à m’intéresser plus aux vallées qu’aux sommets et plus aux montagnards qu’aux alpinistes. »
Dans le compte-rendu d’un voyage on peut lire les faits marquants, contempler les paysages traversés, ressentir les difficultés et les joies des participants, bref, on peut se laisser porter par le flux de l’aventure et cela suffit à nous combler. On peut aussi lire bien d’autres choses…
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Alors que le léopard des neiges reste invisible, Peter Matthiesen écrit :
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Paolo Cognetti dit la même chose autrement
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Au fil du voyage, on comprend que ce n’est pas l’arrivée qui est le but de la marche mais la marche elle-même.
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L’auteur ne peut pas faire l’impasse sur ses inquiétudes quant à l’avenirde la montagne. Il pense que ce n’est pas la pauvreté qui désertifiera la montagne mais l’opulence.
Lire ce livre nous fait découvrir le monde insolite de la haute montagne et comment, dans des conditions très austères, les hommes y vivent. Il met aussi en évidence une menace : celle de voir la montagne se dénaturer. Pour que cette menace ne se concrétise pas, il faut que tous ceux qui parcourent la montagne, comme tous ceux qui y vivent ne se comportent pas en colonisateurs et en intrus sans gêne mais en invités discrets et respectueux.
![Capture d’écran 2017-06-08 à 11.30.03.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_16afddb8e35a440bb3418dbfcfa8a163~mv2.png/v1/fill/w_135,h_203,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-06-08%20%C3%A0%2011_30_03_pn.png)
Vélibor COLIC « MANUEL D’EXIL », témoignage autobiographique.
L’auteur et son œuvre
Né en 1964 Velibor Colic fait des études littéraires dans l’ex Yougoslavie puis commencé une carrière de journaliste spécialiste du rock et du jazz. Enrôlé dans l’armée bosniaque il déserte en 1992. Fuyant les horreurs de la guerre entre les Serbes, les Bosniaques et les Croates, il se
réfugie en France. Il a 28 ans quand il arrive à la gare de Rennes. « Je suis loin et […] ce loin est devenu ma patrie et mon destin. » Il est seul, déplacé, démuni, mal vêtu, sans bagage. Il passe le seuil du malheur pour entrer dans un autre monde qui n’est ni celui de la résignation ni celui de l’oubli mais celui de l’anesthésie. Il est l’auteur d’une douzaine de livres. Il écrit en français depuis 2008.
Le contenu
Velibor COLIC nous raconte avec beaucoup d’humour ses diverses expériences… Il essaie de prier Dieu mais sans succès. « Je suis sans doute trop pressé, notre Créateur travaille dans l’éternité et mon destin est furtif. » Un médecin lui prescrit « une TCC pour un ESPT !!!
» Il s’agit d’une Thérapie d’Approche Cognito-Comportementale pour traiter l’État de Stress Post Traumatique. L’origine de son stress il le connaît bien. C’était, écrit-il, très précisément « le 18 mai 1992, un après-midi paisible, bleu et clair, presque transparent. » Un groupe de soldats au repos dont il fait partie boit un café lorsqu’un sniper tue d’une balle dans la gorge une petite fille qui joue paisiblement à côté d’eux. « Le sang qui trempe dans la poussière autour d’elle est un tel fardeau pour nous tous, pour ce maudit pays et pour cette putain de guerre. Écrivain dans son ancien pays, il veut le rester dans son nouveau. « Il me faut apprendre le plus rapidement possible le français. Ainsi ma douleur restera à jamais dans ma langue maternelle. » Pour obtenir ses papiers, il explique comment, devenu soldat contre son gré, il a refusé de tirer sur l’ennemi qu’on lui désignait, comment il a été incarcéré, frappé, humilié. Il conclut « L’homme sans papiers est un homme sans visage. L’homme sans patrie n’est rien, un arbre sans tronc ou un oiseau sans ailes. »
Pourquoi lire « Manuel d’exil » ?
Lire ce livre est indispensable. La voix de Vélibor COLIC que la souffrance fait trembler mais jamais ne fait taire est celle d’un homme debout et libre. Ce déraciné cherchant une terre propice à un nouvel enracinement montre que la vie en exil n’est pas l’exil de la vie mais la recherche de la vie. Dans leur parcours tragique les exilés parviennent à survivre en utilisant tous les moyens que le hasard leur offre et que leur volonté saisit au vol en utilisant toutes les ressources morales, physiques et intellectuelles qu’ils se forgent pour dessiner peu à peu le chemin de leur nouvelle vie. Vélibor Colic nous dit qu’il ne faut pas se laisser bercer par le rêve d’un paradis illusoire mais qu’il faut vivre à plein temps sans espérer ni attendre quoi que ce soit. Ce qui n’interdit pas de faire des projets !
![LA TRESSE .png](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_41b9d87e93fb463f81428b19c80de1b2~mv2.png/v1/fill/w_133,h_189,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/LA%20TRESSE%20.png)
LA TRESSE de Laetitia COLOMBANI, roman
L’auteur
Née en 1976 comédienne, scénariste, réalisatrice : À la folie… pas du tout, 2002. Mes stars et moi, 2008. La Tresse est son premier roman
Le contenu et la forme
Trois histoires cheminent en parallèle, chacune concerne une femme : Smita l’Indienne, Giulia la Sicilienne, Sarah la Canadienne. En cheminant avec Smita, Giulia et Sarah, chacune de ces femmes ignorant tout de l’autre, nous nous demandons s’il existe des exceptions à la règle qui dit que des parallèles ne se rejoignent qu’à l’infini, autant dire jamais. Ce livre est très intelligemment construit. Chaque chapitre présente alternativement le parcours de Smita, Giulia, Sarah sans fil conducteur apparent ; c’est au lecteur de chercher s’il y a un lien, et lequel, entre les histoires d’autant que le cheminement n’est pas une ligne droite. Chaque moment du livre est un moment d’étonnement et un carrefour où s’offrent plusieurs directions possibles.
Le rythme de la narration est vif, sans temps mort, sauf parfois dans les parties plus méditatives où le phrasé s’apaise. Il y a peu de développement descriptif ni pour les paysages ni pour les protagonistes. La plupart des métaphores sont des lieux communs et les comparaisons sont assez banales. On se demande à la fin s’il s’agit d’un roman ou d’un scénario mais dans le fond la question est peut-être sans importance tant est dense l’intensité du récit et l’émotion profonde.
Pourquoi lire LA TRESSE ?
Il faut lire ce livre pour plusieurs raisons.
Il est humain. Les êtres humains ont la liberté de choisir entre le Bien et le Mal. S’ils sont moraux ils choisissent le Bien.
Toute personne (par définition individuée) est soumise aux contraintes de la société de ses règles, de ses traditions, de ses mœurs. Ces contraintes sociales sont parfois des obstacles à la liberté et à l’épanouissement de l’individu en tant que tel.
Il est roboratif. Face aux contraintes sociales et aux pires injustices dont elles sont victimes, les femmes, malgré leur faiblesse apparente, montrent qu’elles ont une force, une énergie et une volonté peu communes pour surmonter les difficultés et les obstacles et atteindre, coûte que coûte, leurs objectifs.
Il parle d’amour. Smita, Giulia, Sarah se battent contre l’adversité. Pour ce faire elles déploient autour d’elle la force de leur amour pour les autres et pour la vie contre l’indifférence, le mépris la haine.
Ce livre peut se référer à celui de Marie NDIAYE « Trois femmes puissantes », prix Goncourt 2009, livre plus difficile d’accès qui tisse lui aussi une « tresse » entre trois femmes qui ne se connaissent pas.
![Capture d’écran 2017-06-15 à 05.18.40.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_1a1fc71eff404a10a5ff040d8e606bec~mv2.png/v1/fill/w_139,h_189,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-06-15%20%C3%A0%2005_18_40_pn.png)
Thomas d’ANSEMBOURG, David Van REYBROUCQ « LA PAIX ÇA S’APPREND », essai.
Les auteurs
Livre écrit à quatre mains par un psychothérapeute spécialiste de la communication non violente, Thomas d’ANSEMBOURG et par un anthropologue, écrivain et dramaturge, David Van REYBROUCQ.
Le contenu
Pour pacifier la société il faut que chaque citoyen qui la compose se pacifie lui-même. Sans individu en paix pas de monde en paix. Se construire c’est construire la paix en soi. Cette construction commence dès la petite enfance et se poursuit la vie durant. Pour se construire et construire la paix trois méthodes sont proposées, à titre d’exemples. Aucun dogme sous-jacent.
La pleine conscience.
La communication non violente.
La bienveillance.
Grâce à ces méthodes, on comprend que la violence génère la violence et que la paix génère la paix. Il faut donc arrêter le mouvement du cercle vicieux de la violence pour mettre en mouvement le cercle vertueux de la paix.
Cela demande du courage car ces méthodes ne sont pas des méthodes d’évitement et de fuite devant les conflits mais des méthodes d’affrontement, de contrôle et de résorption.
Pourquoi lire « La paix ça s’apprend ? »
Pour comprendre que la violence n’est pas une fatalité.
Pour comprendre que la violence n’est pas génétique mais culturelle.
Pour découvrir des méthodes qui permettent d’apprendre la paix.
Pour donner le désir et acquérir la volonté de construire la paix.
Pour comprendre enfin que c’est à chacun de nous de pacifier le monde.
On conseille comme prolongement à ce livre court, la lecture d’un livre plus long mais tout aussi roboratif. Lire de Matthieu RICARD : « PLAIDOYER POUR L’ALTRUISME », avec pour (Sous-titre : « La force de la bienveillance. »
![ELOGE_DES_FRONTIÈRES_.png](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_a7dd706d393c4e5bb11e96b886d0b2dc~mv2.png/v1/fill/w_153,h_243,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/ELOGE_DES_FRONTI%C3%88RES_.png)
L’ ELOGE DES FRONTIÈRES de Régis DEBRAY
Régis Debray né en 1940 est écrivain, philosophe, haut fonctionnaire. Il a été emprisonné et torturé dans les années 1960 pour avoir milité aux côtés de Che Guevara. Auteur d’environ quatre-vingt livres.
Chaque individu, consciemment ou non, définit les frontières de son propre territoire, de son intimité, de sa vie privée, et chacun accepte ou refuse que les autres franchissent cette frontière personnelle. Régis Debray écrit « Le mur interdit le passage, la frontière le régule. » Il définit la frontière comme une « couche isolante dont le rôle n’est pas d’interdire mais de réguler l’échange. » La peau est l’exemple le plus frappant. Une peau qui serait totalement perméable ou totalement imperméable conduirait l’organisme à la mort. Celui qui vient sur le territoire de l’autre ne doit être ni l’envahisseur ni l’occupant mais un visiteur attentif, désireux d’échanges productifs. Ce mouvement de l’Un à l’Autre et de l’Autre à l’Un est une opération délicate car si l’égocentrisme peut scléroser, l’altruisme peut déstructurer. Aller vers l’Autre et accueillir l’Autre chez soi sont des actes féconds dans la mesure où il y a désir de connaissance et de reconnaissance réciproques. Régis Debray : « Quand on ne sait pas qui l’on est on est mal avec tout le monde. » Être dans le Monde c’est connaître le Monde et se connaître soi. « Qui entend se surpasser commence par se délimiter. » Tous les conflits de l’histoire ont pour cause la difficulté de l’être humain à trouver le juste équilibre entre le désir de se surpasser et de surpasser l’autre. La concurrence et la compétition ne sont stimulantes que s’il y a empathie et morale. L’absence d’empathie et de morale fait le lit du totalitarisme qu’il soit brun, rouge ou incolore… Sans empathie ni morale on arrive, à cette phrase terrible de Ben Gourion : « Les frontières sont là où sont les juifs, pas là où il y a une ligne sur la carte ! » C’est la loi du plus fort. L’Homme qui se soumet à cette loi n’est pas différent de la bête sauvage qui marque son territoire en déféquant ou urinant un peu partout. Le comportement brutal de l’animal s’explique par son amoralité mais comment l’être humain qui est un être doté d’une morale peut-il se justifier ?
Quand l’artiste Marcel Duchamp parle d’une « porte à la fois ouverte et fermée » il dit que c’est nous qui sommes responsables de l’ouverture et de la fermeture de la porte et qu’on ne peut faire aucun grief à la porte d’être ouverte ou fermée. Il y a toujours quelqu’un qui ouvre ou qui ferme la porte. Il y a toujours quelqu’un pour accueillir ou repousser l’autre et son altérité. Accueillir demande du courage et s’il y a des risques d’erreur il vaut mieux prendre le risque de l’accueil que celui du rejet
Faire l’éloge des frontières c’est faire l’éloge du risque des ouvertures et des passages. Un mur ne fait courir aucun risque. Un mur est toujours fermé. Un mur est toujours un mur de la honte.
![Capture d’écran 2017-10-23 à 15.30.47.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_f03fba85edd94dc6911904aad7348511~mv2.png/v1/fill/w_132,h_246,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-10-23%20%C3%A0%2015_30_47_pn.png)
ZABOR de Kamel DAOUD, roman
Kamel Daoud, journaliste et écrivain algérien. Il a obtenu le Goncourt du premier roman avec « Meursault contre enquête. »
« Écrire contre la mort » pourrait être un sous titre pour ce livre et un autre serait « raconter des histoires pour perpétuer la vie. » Le héro de ce livre, un enfant malmené par les siens sans lien affectif et peu aidé par la nature (il est frêle, pas très beau pour ne pas dire laid) découvre comme une « malédiction » que les mots qu’il écrit sauve des vies. « Quand […] j’utilise les bons mots, la mort redevient aveugle et tourne en rond dans le ciel puis s’éloigne. » « Écrire est la seule ruse efficace contre la mort. Les gens ont essayé la prière, les médicaments la magie, les versets en boucle ou l’immobilité mais je pense être le seul à avoir trouvé la solution » Dans le village où il vit et qu’il ne quitte pas il est le seul à savoir lire et écrire et cela lui confère un pouvoir qui l’encombre et une responsabilité qui l’accable. « Je suis responsable des miens, du village de sa fin possible, de ses cycles de naissance et de mort. Je le tiens en équilibre sur mes épaules. » Tantôt on le révère comme un dieu bienfaisant et tantôt on l’exècre comme un démon malfaisant.
C’est un livre sur la vie et les mots qui la disent et qui pose la question de savoir si sans les mots qui la disent la vie serait la vie ? C’est un livre qui nous fait cheminer dans des méandres relationnels compliqués et durs et qui pose la question de la rancune, de la haine, du mépris, de la compassion et en définitive de l’amour.
C’est un long et lent suspens : le fils thaumaturge a-t-il encore assez d’amour pour sauver son père à l’agonie qui l’a toujours exécré. Le père souffrant sauvera-t-il son fils de la malédiction de la haine ? « Je suis le fils du mourant mais un fils malade, solitaire et frappé du mal de l’inconsistance que donnent les livres. »
Ce livre nous permet de mieux appréhender les sentiments humains (l’amour, l’indifférence, la haine, le mépris) ainsi que les valeurs morales que sont la compassion, le pardon, la bienfaisance
De nombreux livres traitent de ces sujets mais au delà de ces thèmes habituels la spécificité de ce livre est de s’interroger lui-même sur ce que le livre est et sur ce que le livre fait. Cela de façon abrupte et en urgence. Le livre protège-il ou doit-on se protéger du livre ? Cette question est une question de vie ou de mort ! Une piste pour la réponse… « Je voulais montrer à mon père mon cahier parfait, le dernier, celui où j’avais atteint l’équilibre du sang et des sens, le lieu de ma révélation, mon corps enfin réparé par une langue précise et souveraine. Je voulais lui dire que j’étais prêt de guérir la mort elle-même. »
![Erri De luca .jpg](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_fdc5c6e1ddaf42518831b17f9164f1ab~mv2.jpg/v1/fill/w_169,h_175,al_c,q_80,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Erri%20De%20luca%20.jpg)
ERRI DE LUCA
Il y a des écrivains qui écrivent des livres et d’autres qui construisent une œuvre. C’est de l’œuvre de Erri De Luca dont je veux dire quelques mots ici. Ceci pour donner envie à ceux et celles qui liront ces lignes de lire et relire cet auteur.
Erri De Luca a plusieurs sources d’inspiration et d’aspiration.
L’HUMANISME. Avec en corollaire, l’engagement politique, la citoyenneté, la résistance, la solidarité, la liberté, le sacré. Il aime l’humanité. Les hommes et les femmes sont toujours au centre de ses histoires.
LA NATURE. Pour lui l’écologie est tout sauf de la politique politicienne. L’écologie est une philosophie, une philosophie de vie, une philosophie essentielle à la vie. Une philosophie nécessairement engagée et militante.
LA MONTAGNE. Erri De Luca lit la montagne et il la vit. De ce fait, escalader les montagnes est pour lui quelque chose de tout à fait naturel. Alpiniste expérimenté il a la capacité de nous faire ressentir la montagne avec lui.
LA MER. La vie insulaire et la pêche sont inhérentes à sa nature. Ils nous emmènent à la pêche en mer.
LA MONTAGNE et LA MER sont des puissances auxquelles l’homme se confronte mais avec lesquelles il veut établir un partenariat de cœur.
L’ÉCRITURE. Chez lui prose et poésie sont proches parentes. Ses mots chantent,
nous enchantent et en même temps ils sont toujours porteurs d’une signification profonde. Lire Erri De Luca est stimulant autant pour le cœur que pour l’esprit. Il fait partie de ces écrivains qui savent à la fois nous détendre et nous développer.
Si vous connaissez déjà Erri De luca, augmentez votre collection de ses livres et si vous ne le connaissez pas, commencez par n’importe lequel d’entre eux : vous ne serez jamais déçus.
Trois pistes… Pour la montagne, lire « Le poids du papillon » ; pour la mer, lire « Tu, mio » ; pour l’humanisme et le sacré lire « La nature exposée*. »
* J’ai fait une fiche spécifique détaillée sur ce livre dans le classeur « Conseil de lectures », classeur à votre disposition la Librairie des Aravis.
![Capture d’écran 2017-06-08 à 10.04.00.pn](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_fe41c7696a0b4ff1ba6e1a7408fc2ab7~mv2.png/v1/fill/w_113,h_171,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99%C3%A9cran%202017-06-08%20%C3%A0%2010_04_00_pn.png)
Erri DE LUCA, LA NATURE EXPOSÉE, roman.
L’auteur et son œuvre
Erri de Luca est un écrivain italien né à Naples en 1950. Auteur d’une trentaine de livres. Ce sont généralement des récits courts à l’écriture vive et syncopée où l’on découvre à chaque page la philosophie et la poésie jamais démonstratives mais toujours intégrées à la vie quotidienne des personnages et à leur histoire. Le présent se relie constamment au passé dont il est le fruit. Les points d’ancrage de son œuvre sont la nature (montagne, mer), l’Homme (humanisme) et l’engagement social (écologie, humanitaire.)
Le contenu de La nature exposée
Le roman raconte l’histoire d’un homme animé par l’amour désintéressé et par la passion de créer sa vie autant que de la vivre. Entre attachement et détachement il exerce diverses fonctions : il extrait du charbon dans une mine, il vend de petits objets qu’il fabrique, il est passeur de clandestins, il devient restaurateur d’œuvres d’art. La restauration d’un Christ en marbre sur la croix est le sujet central du livre. Les diverses péripéties de l’aventure montrent ce dont est capable un homme animé par la passion d’être, d’aimer et de créer et cela même dans les gestes les plus quotidiens. Les diverses digressions montrent le lien vital qui se tisse en permanence entre le passé et le présent « Je ne connais personne sans une nostalgie d’une heure et de quelqu’un » et entre toutes les personnes qui se respectent et qui se parlent. « Tu es quelqu’un et tu me fais devenir quelqu’un. » Et enfin voici une phrase qui exprime bien ce qui anime le « sculpteur. »
« Il existe une gratuité de l’économie, quelque chose en échange de rien mais comme symbole de beaucoup. J’accepte, c’est un bloc rare. »
Pourquoi lire « La nature exposée » ?
Pour son contenu culturel. Il montre que l’homme animé par la passion d’être et de faire vit pleinement. Il ne se soustrait pas à la vie et ne s’en distrait pas.
Pour son contenu humaniste et social. Erri de Luca montre que le respect et l’acceptation des différences, l’altruisme et la compassion peuvent, sinon renverser les montagnes du moins les traverser : les barrières deviennent alors des passerelles. Il fait aussi se confronter de façon constructive le religieux et le profane, le divin et l’athée.
Pour son humour. La vie est un assemblage d’émotions, de souffrances, de joie. Erri de Luca ne se complait jamais dans la déploration. Il sait par des faits ou des propos savoureux allumer (ou rallumer) notre sourire.
La nature exposée donne au lecteur le désir d’être lui aussi le créateur et l’acteur de sa propre vie. Avec les autres et en les aimant. L’amour n’est pas le but mais le sens.
![LE_MIEL_à_IMPRIMER_.png](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_213c39fd66a74b688daec0068b49f27f~mv2.png/v1/fill/w_125,h_204,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/LE_MIEL_%C3%A0_IMPRIMER_.png)
LE MIEL de Slobodan DESPOT, roman
Né en 1967 dans l’ex Yougoslavie aujourd’hui Serbie, Slobodan Despot, écrivain est cofondateur des éditions Xénia à Sion en Suisse. Il est l’auteur de plusieurs livres dont « Le miel. »
Le miel symbole de douceur, de poésie et de paix se trouve englué ici dans le bourbier du terrible conflit qui a opposé les Bosniaques, les Serbes et les Croates et qui a ensanglanté l’ex Yougoslavie entre 1992 à 1995.
Le livre commence par un autre affrontement d’une rare violence : celui qui oppose sur une aire d’autoroute un père à son fils teigneux et agressif à propos d’une somme d’argent que le fils réclame au père qu’il rend responsable de la panne de voiture qui l’immobilise. Une herboriste de passage témoin de l’altercation, et voulant qu’elle cesse, offre spontanément la somme nécessaire à la réparation. « C’était l’Ancien Testament à l’envers. Non plus Jéhovah arrêtant la main du père sur la gorge de son fils mais une divinité femelle arrêtant la main du fils sur la tête de son père. Tout un symbole… » Quelques semaines pus tard le fils rend à l’inconnue l’argent qu’elle lui prêté avec en cadeau de remerciement cinquante kilos de miel. C’est pour lui l’occasion de raconter l’histoire qui le lie à son père et qui les lient tous deux à la guerre serbo-croato-bosniaque.
L’histoire commence quand il s’agit de retrouver le père perdu en terre ennemie « Ne me dis pas que tu l’as oublié là-bas ? » Une fois la trace du père retrouvée il s’agit d’aller le chercher derrière les lignes pour le ramener au pays sous la menace constante de l’arrestation, de l’emprisonnement ou pire de l’exécution sommaire. Road movie en temps de guerre le livre raconte comment un fils et son père apiculteur ayant à contrecœur quitté ses ruches. « Je n’ai jamais demandé qu’on vienne me chercher », traversent en voiture un pays miné au sens propre et au sens figuré. Cette aventure rocambolesque ou le miel sert de monnaie d’échange et de pot-de-vin montre l’absurdité des conflits armés en même temps que leur dangerosité extrême. Elle montre aussi que l’attachement d’un fils à son père est aussi puissant que le désir de le tuer, que l’innocence du père qui se croyant protéger par ses abeilles leur fait davantage confiance qu’aux hommes, enfin elle montre les vertus de la générosité sans calcul cet autre nom de l’amour.
Ce récit parle de la guerre avec ses vices, ses exactions, sa laideur mais aussi de la paix avec ses vertus, ses beautés et surtout avec la bienveillance latente des hommes qui ne demande qu’à se réveiller. Il parle de l’entêtement des hommes à faire librement ce qu’ils ont à faire et, en définitive, à être heureux autant qu’il est possible de l’être et à aider les autres à l’être. « […] c’était le printemps […] la cabane était moins hideuse que je m’y attendais Il y avait des fleurs tout autour., une grande table sur le terre-plein. Des ruches étaient installées en lisière de la forêt à quelques dizaines de mètres. »
Le personnage central du livre nous dit : « Ce récit a changé mes vues sur la politique, l’identité, la morale et l’histoire. » Après avoir lu « Le miel » il est fort possible que le lecteur tienne même le langage. Après tout le propre de tout bon livre n’est-il pas de nous faire changer ?
![Capture d’écran 2020-07-20 à 17.27.14.](https://static.wixstatic.com/media/4417f1_90cfc7e424c8498195005f61cdf8368a~mv2.png/v1/fill/w_154,h_238,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/Capture%20d%E2%80%99e%CC%81cran%202020-07-20%20a%CC%80%2017_27_14_.png)
CARMEN ET TÉO d’Olivier Duhamel et Delphine Grouès
Delphine Grouès, directrice à Sciences Po, spécialiste du Chili, des oppressions et de la mémoire historique.
Olivier Duhamel, professeur, journaliste, écrivain, spécialiste de la vie politique et auteur d’un livre sur le Chili (Chili ou la tentative) paru en 1974.
Le récit se déroule au Chili entre 1960 et 2000 environ. On connaît bien ceux qui on joué les premiers rôles pendant cette période : Nixon, De Gaulle, Che Guevara Fidel Castro, Pablo Neruda, et bien entendu Salvator Allende et Augusto Pinochet… On connaît moins les seconds rôles qui, sans jouer un rôle spectaculaire, ont néanmoins influé sur le cours de l’histoire, Carmen et Téo sont de ceux-là. Sans ces militants de l’ombre l’histoire aurait été autre.
Quand le socialiste Salvator Allende arrive au pouvoir en 1970 les USA sont fous de rage. Ils ne veulent pas qu’un gouvernement socialiste, proche parent du marxisme, s’installe dans un pays d’Amérique du Sud et ils font tout pour le déstabiliser. Allende ne reste au pouvoir que trois ans. Une junte militaire soutenue par les USA et conduite par le général Pinochet fait un coup d’État. Allende se serait suicidé avant l’arrivée des militaires mais rien n’est certain. Allende mort, le gouvernement renversé, Pinochet met en place une dictature militaire et fait régner l’ordre par la terreur de 1973 à 1990. En 1990 c’est le retour à la démocratie avec Patricio Aylwin (1990-1994) puis Eduardo Frei (1994-2000)
Carmen et Téo ainsi que d’autres protagonistes de cette histoire sont, en quelque sorte, les paradigmes de la fidélité à des valeurs libertaires et égalitaires qui les conduit inévitablement à lutter contre l’oppression. Ils ont milité pour le socialisme avec conviction jusqu’en 1973 et à partir de1973 ils ont résisté avec leurs moyens à l’oppression et aux exactions du régime Pinochet.
Extrait du discours d’ Allende juste avant sa mort « […] Je m’adresse tout d’abord à la modeste femme de notre terre, à la paysanne qui a cru en nous, à l’ouvrière qui a travaillé davantage, à la mère qui a connu notre préoccupation pour les enfants qui ne cherchent qu’à obtenir les avantages que la société capitaliste n’accorde qu’à une poigné de gens. […] Vive le Chili ! Vive le peuple ! Vive les travailleurs Ce sont mes dernières paroles. J’ai la certitude que mon sacrifice ne sera pas vain. […] »
Ce livre, à la fois roman d’aventure sans complaisance et roman à thèse sans lourdeur didactique, doit être lu pour bien comprendre que l’histoire déjà ancienne de ces résistants - on peut établir une analogie avec les résistants contre le joug nazi - est le terreau dans lequel s’enracine et fructifie notre propre histoire.